David Goodhart
Britannique
Somewhere vs. Anywere
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"Si nous voulons être intraitables avec le populisme, il nous faut l'être avec ses causes."
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Les "Somewheres", attachés à leurs racines, subissent sans raison l'idéologie et le mépris des "Anywhere", formés à s'adapter à la mondialisation. Leur vote pour le Brexit, Donald Trump, Marine Le Pen ou Mélanchon, est une révolte.
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Biographie
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David Goodhart, figure de la gauche britannique, est passé du progressisme au "post progressisme".
Fondateur du magazine Prospect
2013 : "The British dream. Successes and Failures of Post-War Immigration"
Dernier ouvrage : "The Road to Somewhere. The populist Revolt and the Future of Politics"
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Les sociétés occidentales se sont fracturées entre les "Somewhere" et les "Anywhere"
Les valeurs des "Somewhere" : appartenance à des groupes et des lieux
Les valeurs des "Anywhere" : la mobilité et le "l'individualisme progressiste".
Cette opposition est plus précise entre peuple et élite, car il y a des employés modestes totalement intégrés à la mondialisation (employés d'amazon) et une bourgeoisie traditionnelle évincée par les nouvelles élites économiques et politiques..
Cette opposition est plus précise que France périphérique et France des métropoles, car il y a des terroirs qui sont totalement intégrés à l'économie mondiale (cognac, champagne, vins de Bordeaux) et une fracture au sein même des métropoles, entre ceux qui profitent de la mondialisation et ceux qui en payent la facture.
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La domination des "Anywhere" au détriment des "Somewhere"
David Goodhart précise que ces deux catégories sont autant légitimes l'une que l'autre ; ce qu'il conteste, c'est la prééminence de la vision Anywhere sur celle des Somwhere, au détriment des seconds, dans des domaines aussi divers que le travail, l'immigration ou la famille. |
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Le système éducatif des pays développés a connu une expansion très importante, donc une expansion du nombre des Anywhere. Il y a eu toujours des Anywhere et des Somewhere, mais les ANywhere représentaient une couche relativement fine au sommet de la société, qui avait de l'influence mais ne dominait pas la société. Ce n'est plus le cas. |
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Il faut encourager la méritocratie, la mobilité et les études supérieures. Mais les Anywhere ont un mépris de classe pour les formations professionnelles, la population qui n'a pas envie de quitter son territoire et sa culture d'origine, ou qui n'a pas envie de tout sacrifier pour sa "réussite" professionnelle.
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L'ouverture des frontières imposée par les Anywhere ne pénalise que les Somewhere.
Autant l'ouverture des frontières est bénéfique aux Anywhere, autant elle nuit aux Somewhere. Elle fait baisser les salaires des moins qualifiés. L'immigration a des conséquences culturelles, produit des changements rapides de notre environnement. Or la grande divergence entre les Anywhere et les Somewhere est leur réaction aux changements. Le sociologue Talcott Parsons opposait identité "assignée" et "construite". Plus vous réussissez, plus votre identité provient de vos réalisations personnelles. Votre identité se fait "portable". Mais, si votre identité provient de vos caractéristiques assignées, de votre lieu et groupe d'origine, le changement vous déstabilise d'avantage. |
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Ce sont les Anywhere qui vivent de la façon la plus conservatrice
Les Anywhere sont beaucoup plus susceptible de se marier et de vivre dans des environnements stables. Inversement nombre de valeurs libérales sont vécues avec réticence par les Somewhere. Les Anywhere infligent leur idéologie aux Somewhere sans la vivre eux même. |
Les Anywhere imposent l'immigration et le multiculturalisme aux Somewhere, alors qu'ils vivent dans les quartiers privilégiés avec le moins d'immigrés et qu'ils mettent leurs enfants dans des écoles limitant la mixité raciale par la sélection par l'argent.
Les Anywhere imposent la flexibilité aux travailleurs non qualifiés, alors qu'eux même bénéficient de la sécurité de l'emploi du fait de leur formation.
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Redonner aux Somewhere la maîtrise de leur destin
Plus qu'une demande de protection, les Somewhere éprouvent un besoin de reprendre la maîtrise de leur destin, ou tout au moins avoir une représentation politique et culturelle dans la société.
Il faut ramener la voix des Somewhere en politique. Les Anywhere doivent montrer plus d'intelligence émotionnelle et de retenue, et se garder de toujours poursuivre leur propres intérêts au détriment de ceux des autres. Il faudrait décentraliser davantage la politique et repenser la politique familiale. Surtout, il faut restaurer le contrat social national : mettre fin à la liberté de circultation sans limite et offrir de véritables formations aux métiers techniques. |